Correspondance du Maréchal Davout
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Au
bivouac d'Eckartsberg, 15 octobre 1806.
Monseigneur, j'ai l'honneur d'adresser à
Votre Altesse les rapports que je reçois à l'instant de mes reconnaissances de
cavalerie sur les points de retraite de l'ennemi.
J'ai envoyé à la pointe du jour le
général Lochet avec un régiment d'infanterie et 100 chevaux à Freybourg, où il
y a un, château à l'abri d'un coup de main 'où j'avais laissé une compagnie du
13, régiment d'infanterie légère. Le général Lochet enverra des partis sur
Mersebourg et sur Querfurth.
Je ne pourrai vous donner, Monseigneur,
aucun rapport sur la bataille d'Eckartsberg ' d'ici à deux jours. Tout le monde
y a fait son devoir; l'infanterie a fait ce que l'on devait attendre de la
meilleure infanterie du monde. La cavalerie s'est fait écharper. Je l'ai
employée pour me donner le temps de déboucher de Kosen. Le projet du Roi était
de déboucher par ce point, de se porter sur Naumbourg; ses autres corps d'armée
devaient déboucher par Freybourg.
Le prince Henri de Prusse a été blessé.
Leur cavalerie, qui a chargé
vigoureusement notre infanterie, a beaucoup souffert; nous avons pris presque
toute l'artillerie de l'ennemi et des drapeaux.
Le général Mollendorf, le duc de
Brunswick, le comte de Kalkreuth, le Roi, ses frères, son oncle, l'élite de
l'armée prussienne, voilà ce que le 3e corps a combattu.
La Reine est partie de Weimar pour Berlin
il y a deux jours.
J'ai remplacé les cartouches et les
munitions consommées, ce qui a entièrement épuisé mon pare de réserve. Je prie
Votre Altesse de donner les ordres les plus prompts au général Songis afin
qu'il me fasse passer toutes les munitions 'qui me sont nécessaires et que
j'estime à un approvisionnement complet.
L'armée est prête à partir. Du point que
j'occupe, je suis plus à portée de remplir les intentions de l'Empereur. Je
demanderai à Votre Altesse des adjudants généraux, des officiers du génie, des
sapeurs, des canonniers, surtout des officiers d'état-major; presque tout ce
que j'en avais a été blessé ou tué.
L'adjudant général Hervo, sous-chef
d'état-major, ainsi que son brave chef le général Daultanne, se sont
particulièrement distingués.
L'adjudant général Hervo est blessé, et il
nous suit. Il est nécessaire d'envoyer des secours d'officiers de santé, des
objets de pansement à Naumbourg, le nombre des blessés étant trèsconsidérable.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Au
bivouac d'Eckartsberg, 15 octobre 1806.
Monseigneur, j'ai l'honneur de rendre
compte à Votre Altesse que d'après ses ordres, je me rends à Naumbourg.
La 1e division sera placée en avant de
Naumbourg; pour maîtriser la route de Weisenfels.
La 2e division se porte sur Freybourg, où
elle appuiera sa gauche pour tenir la route de Mersebourg.
La 3e division restera aujourd'hui en
position à Eckartsberg pour couvrir l'évacuation des parcs et ambulances ;
demain elle entrera à Naumbourg.
La cavalerie légère sera établie à
Leisling sur la route de Weisenfels, éclairant la route de Leipzig.
Le 1er régiment de chasseurs à Leiha pour
éclairer la route de Mersebourg.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Naumbourg,
là octobre 1806, à minuit.
Monseigneur, j'ai reçu la lettre que Votre
Altesse m'a écrite par mon aide de camp Falcon.
Vos ordres sont exécutés; le corps
d'armée, ainsi que j'ai eu l'honneur de vous en rendre compte, est à Freybourg
et à Naumbourg; le prince de Ponte-Corvo est maintenant entre moi et l'ennemi :
je ne puis en conséquence le poursuivre, mais je me tiendrai toujours en mesure
d'exécuter les dispositions que renferme votre lettre du 15.
J'ai l'honneur de vous faire connaître le
nouveau rapport que je reçois du général commandant la cavalerie du 30 corps:
« Grossnenhausen, 15
octobre, à quatre heures et demie du soir.
« Une colonne de l'ennemi que j'ai en vue
se dirige par a Colleda; l'autre que j'ai en vue marche sur Osterhausen. »
Ces rapports me paraissent bons. Le
prince de Hohenlohe, depuis la mort du duc de Brunswick et la blessure du Roi,
parait être investi du commandement général; il fait courir le bruit qu'il veut
tenter encore le sort des armes du côté de Frankenhausen.
Une grande partie des bagages se sont
dirigés sur Erfurt avec quelques troupes; les ennemis doivent tenter ce
sacrifice pour sauver leur infanterie et leur cavalerie, et les rallier sous
Magdebourg; tel est le plan qui a été arrêté, m'a assuré un officier prussien.
Parmi les deux mille et quelques cents
prisonniers dont j'ai déjà connaissance, il s'y trouve deux généraux, plusieurs
colonels et soixante et quelques officiers de grades inférieurs.
Tous les régiments du 3e corps, quelques
pertes qu'ils aient faites, ont conservé leurs drapeaux, même les régiments qui
ont perdu les deux tiers de leur monde; tels sont les 13' d'infanterie légère,
12e et 85e de ligne ; la perte des officiers est très-considérable.
Le 17e a un drapeau de la garde royale à
la tête de laquelle le Roi a donné.
P. S. - Je reçois à l'instant un nouveau
rapport du général commandant la cavalerie légère:
« Vingt-cinq pièces de canon ont été
prises ce matin, ainsi que beaucoup de caissons; le tout était abandonné et n'a
pu être emmené, faute de chevaux. »
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Naumbourg,
16 octobre 1806.
Monseigneur, j'ai l'honneur de rendre
compte à Votre Altesse de la position qu'occupe le corps d'armée.
La 1er division est en arrière de
Weisenfels, ayant son avantgarde sur la route de Leipzig et des grand'gardes
sur la rive gauche de la Saale pour couvrir le pont et être maîtresse du
débouché sur Mersebourg.
La 2e division occupe la position de
Freybourg et se lie par des postes et patrouilles avec le 1er corps d'armée.
La 3e division est placée une lieue en
avant de Naumbourg, à cheval sur la route de Leipzig, ayant sur son front la
Wethaubach.
Les 2e et 12e régiments de chasseurs sont
à Keina, avec ordre de pousser de fortes reconnaissances sur Mersebourg, Halle
et Eisleben.
Le ler régiment de chasseurs est en avant
de Weisenfeld, pour éclairer les routes de Leipzig, Pegau et Altenbourg. J'ai
l'honneur d'adresser à Votre Altesse le rapport du général Friant. Il lui fera
connaître la nécessité de pourvoir au remplacement des officiers supérieurs qui
manquent à plusieurs des régiments qui la composent.
Les divers mouvements que le corps
d'armée a faits depuis le 14 ne m'ont point permis de recueillir encore la
totalité des rapports. Dès qu'ils me seront parvenus, je m'empresserai d'avoir
l'honneur de vous en faire passer un général.
A
l'Empereur et Roi.
Naumbourg,
16 octobre 1806.
Sire, les félicitations que Votre Majesté
veut bien adresser à son 31 corps et aux généraux qui le commandent les
pénètrent tous de la plus profonde sensibilité; déjà, Sire, leur dévouement à
votre personne était sans bornes; ils ne sauraient y ajouter, mais ils brûlent
de trouver l'occasion de vous en donner de nouveaux témoignages. L'expression
de la satisfaction de Votre Majesté va devenir pour nos blessés un motif de
consolation de ce qu'ils ne pourront aussitôt que leurs camarades courir à
d'autres dangers. Quant aux braves que nous avons perdus, Sire, ils sont morts
en héros: leur dernier voeu a été pour leur bien-aimé souverain.
Permettez, Sire, pour ce qui me concerne,
de vous exprimer combien je suis touché des éloges de Votre Majesté; mon sang
vous appartient; je le verserai avec plaisir dans toutes les occasions, et ma
récompense sera de mériter votre estime et votre bienveillance.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Naumbourg,
17 octobre 1806.
Monseigneur, j'ai l'honneur de rendre
compte à Votre Altesse qu'il y a environ 2,000 prisonniers à Naumbourg, et que
les villages environnants en fourmillent; j'ai l'honneur d'en prévenir Votre
Altesse, afin qu'elle donne des ordres à leur égard, vu le départ du corps
d'armée, ainsi que pour le transport que Votre Altesse a bien voulu m'annoncer
devoir avoir lieu sur un autre point que celui qui avait d'abord été désigné.
J'ai également l'honneur de prévenir
Votre Altesse que d'après l'autorisation qu'elle m'en a donnée, je laisse à
Naumbourg le 85e régiment, au lieu du 13e régiment d'infanterie légère ou du
12e de ligne. Le chef de bataillon Husson, officier ferme et d'une grande
distinction, qui commande ce régiment, commandera la place de Naumbourg; il est
chargé de prendre les ordres de Votre Altesse pour le transport des
prisonniers.
Le
Général Gudin au Maréchal Davout.
Naumbourg
17 octobre 1806.
J'ai l'honneur de vous, rendre compte
que, conformément à vos ordres, ma division est partie le 14 octobre à quatre
heures du matin de sa position de Neufleming pour passer la Saale au pont de
Kosen; à six heures, la tête de la division a traversé le défilé, et le 25e
régiment d'infanterie de ligne, commandé par le colonel Cassagne, s'est formé
en colonne à droite de la chaussée d'Erfurt, tandis que le 85e arrivait sur la
gauche, le 21e régiment d'infanterie de ligne suivant le mouvement du 85e, et
le 12e celui du 251.
Arrivé à la hauteur du village d'Hassenhausen,
la découverte du 1er régiment de chasseurs rencontra l'ennemi et vint se
rallier au 25, régiment. Le général Gauthier fit alors former le carré à ce
régiment, et à peine cette manoeuvre était terminée qu'une batterie de 6 pièces
ennemies placées en avant du village commença un feu très-vif, et qui nous
aurait infiniment fait souffrir si le général Gauthier ne l'eût fait enlever
par deux compagnies de grenadiers et une de voltigeurs, sous la direction de
son aide de camp le capitaine Lagoublaye; cette charge fut en même temps
appuyée par un détachement du 1er régiment de chasseurs commandé parle
capitaine Hullot, et par le feu de notre artillerie établie aux flancs du 25e.
Nous nous sommes alors portés à la tête
du village d'Hassenhausen; l'ennemi voulant profiter de l'isolement dans lequel
se trouvait le 25e, ce corps eut à résister à une charge de cavalerie soutenue
par une batterie pareille à celle que nous venions d'enlever, mais il la
repoussa avec la plus grande vigueur. Le 25e avançait pendant ce temps sur la
gauche.
L'effort que faisait l'ennemi sur ma
droite me détermina à y faire passer le 21e régiment de ligne, et à peine ce
régiment fut-il arrivé qu'il fut chargé vigoureusement par la cavalerie; mais
le feu de ce régiment obligea l'ennemi à une prompte retraite.
Le 12e régiment arrivait alors en arrière
du 21e régiment; la cavalerie prussienne voulut encore essayer une charge, mais
le peu de succès qu'elle avait eu aux précédentes et la contenance du régiment
l'en empêchèrent.
Le 85e régiment pendant ces événements
était sur la gauche, combattant sous la conduite de son brave colonel Viala.
L'ennemi, voyant que la majorité de nos
forces étaient portées sur la droite, où j'avais réuni presque toute mon
artillerie, se prolongea sur la sienne et dirigea les attaques contre le 85e,
qui eut alors à combattre infanterie, cavalerie et artillerie.
Ce régiment repoussa plusieurs des
charges dirigées contre lui, mais il eût infailliblement succombé, si le 12e
régiment, commandé par le colonel Vergez, ne se fût porté promptement à son
secours. Ce dernier était à peine sur le terrain qu'il fut assailli par toutes
les forces que l'ennemi avait sur ce point, et sans l'extrême bravoure qu'il a
déployée, la division, tournée complétement sur sa gauche, courait les plus
grands dangers. Pendant que le 12e régiment se portait à la gauche et en
arrière du village d'Hassenhausen, le 21e régiment, sous les ordres du colonel
Dufour, s'y établissait en avant, occupant le village par son centre.
La résistance des régiments de la
division contre des forces aussi supérieures ayant donné le temps à la 1re
division d'arriver à notre secours, le combat redevint offensif, et les efforts
que nous avions faits pour la conservation du village d'Hassenhausen furent
couronnés du plus grand succès; car l'ennemi fut obligé de nous abandonner
toute l'artillerie qu'il nous avait laissée sur ce point.
Le corps d'armée étant de ligne, la
division marcha sur le village de Tauchwitz, poursuivant l'ennemi devant elle,
et ce village fut enlevé avec la plus grande énergie; une compagnie de sapeurs
entre autres y entra à la baïonnette, culbuta tout ce qui se trouvait devant
elle et fit un bon nombre de prisonniers; un petit détachement du 21 régiment
de chasseurs, conduit par M. le capitaine Decouz, chargea aussi très à propos
et avec succès.
Nous nous portâmes ensuite sur ce village
de Popel, qui fut enlevé aussi avec la même facilité, et la division vint se
former d'après vos ordres sur le rideau qui domine les villages d'Auerstaedt et
de Reisdorf.
Pendant que nous exécutions ce mouvement,
le général Petit, ayant avec lui 400 hommes des 12e et 21e régiments, contribua
puissamment à l'enlèvement du plateau d'Eckartsberg, qui fut le dernier exploit
de la journée et où le reste de l'artillerie, que l'ennemi avait mis en
batterie contre nous, fut enlevé.
Je ne saurais, Monsieur le Maréchal, vous
faire trop d'éloges de la conduite de MM. les officiers des corps de ma
division; tous ont montré qu'ils étaient dignes de faire partie de la grande
armée et du général en chef auquel notre auguste souverain en a confié la
direction.
J'ai à vous citer particulièrement le
général Petit, qui a été blessé, a eu un cheval tué et un autre percé de trois
balles;
Le général Gauthier, qui a eu aussi un
cheval tué sous lui et qui a été blessé lui-même;
L'adjudant commandant Delotz, chef
d'état-major de la division, officier du plus grand mérite, qui a eu la cuisse
traversée d'un biscaïen;
Le colonel Viala, qui a reçu un biscaïen
dans les reins et a eu un cheval tué;
Le colonel Cassagne, blessé légèrement,
et dont le cheval a été emporté d'un boulet de canon;
Le chef de bataillon Groguet, officier
très-distingué, qui a eu la cuisse emportée par un boulet et son cheval tué
sous lui;
Le chef de bataillon Husson, qui a pris
le commandement du 850, en remplacement du brave colonel Viala;
Les chefs de bataillon Vaugrigneuse, du
21e; Saint-Faust qui a eu un cheval tué, et Lavallée, du 25e; ce dernier a été
blessé trois fois, sans vouloir quitter le champ de bataille. J'ai aussi
beaucoup à me louer des officiers d'état-major
Le chef de bataillon Gudin; le lieutenant
de Creutzer, atteint d'une balle légèrement au bras droit sans contusion et
plusieurs dans ses habits; le chef d'escadron Cabrol; mes trois aides de camp;
les capitaines adjoints Ferraris et Massot, et le capitaine du génie Sirès; le
capitaine Lagoublaye, aide de camp du général Gauthier, qui a eu le genou
fracassé; le lieutenant Frossart, aussi aide de camp du général Gauthier, qui a
eu un cheval tué, et le lieutenant Guyot, aide de camp du général Petit, qui a
eu un cheval tué sous lui.
Je dois aussi des éloges à l'artillerie,
et particulièrement au chef d'escadron Pelegrin, qui la commandait.
Il m'est impossible de vous désigner tous
les braves qui se sont distingués dans cette journée mémorable; mais je
recommande particulièrement à vos bontés tous ceux que je viens de désigner. Je
joins aussi les rapports qui m'ont été adressés par MM. les généraux et
colonels, et où plusieurs d'eux se trouvent désignés.
La perte de l'ennemi a été énorme en tués
et blessés; nous lui avons fait 1,200 prisonniers , et la division peut compter
avoir pris 25 pièces de canon et un drapeau. J'ai aussi considérablement
souffert, et d'après les états qui m'ont été fournis, notre perte passe 3,500
hommes, parmi lesquels se trouvent 124 officiers.
GUDIN.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Leipzig,
18 octobre.
J'ai l'honneur de rendre compte à Votre
Altesse que tous les renseignements du pays, qui sont unanimes, ne placent
aucun corps de Prussiens entre Leipzig et Dresde, ainsi que sur les routes de
Dessau, de Wittenberg et de Torgau. Depuis quelques jours plusieurs officiers
saxons sont venus à Leipzig recommander que l'on dirige sur Mühlberg-sur-l'Elbe
tous les Saxons égarés ou autres qui arriveraient à Leipzig.
La consternation est entre la Mulda et
l'Elbe. Les partis sont en route depuis quatre heures sur tous les points, afin
d'intercepter les dépêches et les courriers, et d'avoir des nouvelles de
l'ennemi; ces partis iront une partie de la nuit et reviendront au jour.
J'aurai l'honneur d'adresser à Votre Altesse les nouvelles importantes qui me
parviendront.
Le corps battu par le maréchal Bernadotte
a dû se replier sur Magdebourg.
Demain, si je ne reçois pas d'ordre, vers
les huit heures du matin, l'armée se mettra en marche. La 1re division se
portera près de Breitenfeld, et le reste entre Breitenfeld et Leipzig : sans ce
mouvement, je ne pourrais être en mesure pour exécuter les ordres de Votre
Altesse.
L'équipage de pontons pris est resté à
Naumbourg, faute de chevaux, ayant été obligé de me servir des chevaux de prise
pour remplacer ceux tués le 14; mais J'ai requis ici 150 chevaux de trait pour
aller chercher les pontons; enfin s'ils arrivaient trop tard, on mettra
l'industrie nécessaire pour remplir les intentions de l'Empereur.
Tout le monde est très-bien disposé; je
n'ai vu un peu de tristesse sur les figures que dans deux régiments, mais ce
sont ceux qui ont perdu plus de la moitié de leur monde, et encore je garantis
qu'ils sont susceptibles d'être électrisés. Sa Majesté peut compter sur son 3e
corps.
J'ai eu l'honneur de faire passer à Votre
Altesse, par mon aide de camp Trobriant, les lettres interceptées ici.
Quelques rapports font blessé le roi de
Prusse dans la bataille du 14.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Duben,
18 octobre 1806.
J'ai l'honneur de rendre compte à Votre
Altesse que la 1re division est en avant de Duben et les deux autres sur la
rive gauche de la Mulda.
Ce matin, il est passé ici un bataillon
et environ 80 chevaux des troupes battues à Halle; la plupart étaient sans
armes; tous les autres régiments ont dû faire leur retraite sur Magdebourg.
On ne nous attendait pas ici; aussi
aucune disposition n'avait été faite pour brûler le pont. J'ai tout lieu de
croire qu'il en sera de même de celui de Wittenberg. Ce matin il n'y avait à
Wittenberg que quarante vieux invalides qui y font le service de la place
depuis des siècles, et depuis il ne s'est retiré aucune troupe ennemie sur
cette route; celles dont j'ai parlé plus haut ont pris la route de Torgau.
Il n'y a à Dresde d'autre troupe que les
gardes, et il y a trois jours qu'on y était dans la plus parfaite ignorance et
par conséquent dans la plus grande tranquillité.
Les voyageurs venant de la Silésie disent
que l'on parle beaucoup des Russes, mais tous déclarent n'en avoir vu aucun. Je
ferai partir cette nuit des détachements d'infanterie et de cavalerie, pour
surprendre le pont sur l'Elbe à Wittenberg, et j'espère que demain avant la
nuit tout le corps d'armée sera sur la rive droite du fleuve.
J'ai laissé, conformément aux ordres de
Votre Altesse, le 13e régiment d'infanterie légère à Leipzig.
Lord Morpeth a dû passer à Hambourg le 6
octobre comme ambassadeur extraordinaire près du roi de Prusse, pour y traiter
des subsides.
Un voyageur venant de Berlin m'a assuré
qu'on y était dans la plus parfaite ignorance, que l'on croyait même que les
Français étaient battus et qu'on avait fait des réjouissances à cette occasion.
Au
Major Général de la Grande Armée Prince de Neufchatel,
Wittenberg,
20 octobre 1806.
Monseigneur, j'ai l'honneur de rendre
compte à Votre Altesse que l'avant-garde du 3e corps a passé l'Elbe aujourd'hui
à dix heures du matin, et est entrée à Wittenberg. Les Prussiens, à l'approche
des Français, ont mis le feu au pont, mais ne sont point restés pour s'opposer
au secours ; le colonel Guyon, du 12e de chasseurs, y en a fait apporter de
très prompts, qui ont eu le meilleur succès;, tout est réparé, l'artillerie
passe.
La cavalerie légère, les 1re et 2e
divisions prendront position en avant, sur les routes de Magdebourg et de
Berlin; la 3e sera sur la rive gauche de l'Elbe.
Maintenant je prie Votre Altesse de me
faire connaître où elle veut que je dirige l'équipage de pont qui me suivait et
qui me devient inutile.
J'ai pensé qu'il était
important que l'Empereur eût une prompte connaissance du passage de l'Elbe;
c'est ce qui fait que je n'ai point voulu différer à vous envoyer un officier,
préférant vous en envoyer un second si j'apprends ici quelque chose de nouveau.